03 août 2006

Alala cette vilaine bien-pensance

On ne le présente plus. Enfin si, quand même... Sociologue au charme ravageur, membre d'honneur de l'Académie de Tchakouliabinsk et auteur remarqué d'une passionnante enquête sur les enculeurs de placentas, ses analyses ne nous laissent jamais indifférents. Pour vous, en toute simplicité, voici le retour tant attendu du Professeur Miguel Enfoiros !




Consanguin : Cher ami, lors de notre dernière rencontre, vous nous avez généreusement fait partager votre point de vue sur la culture consanguine de l'écrit. Un souvenir chargé d'émotion ! Et c'est avec une impatience un peu crétine que nous vous proposons aujourd'hui de pousser cette réflexion plus loin encore, vers un horizon vertigineux : notre profondeur intellectuelle.


M. Enfoiros : Hé hé hé ! OK, allons-y. En fait il y a peu de choses à dire sur votre indicible médiocrité infra-intellectuelle, ce petit cocktail de lieux communs qui bout à basse température. Mais l'exercice, comme d'habitude, promet d'être divertissant.

La première chose qui me frappe à ce sujet, c'est votre manichéisme désarmant, cette formidable naïveté qui, entre autres détails grotesques, vous distingue instantanément du reste de l'espèce humaine... Nourries de fantasmes identitaires d'une invraisemblable puérilité, d'obsessions conspirationnistes de bas étage et de pitoyables frustrations sécuritaires, vos "théories" binaires s'enchaînent d'une manière extraordinairement prévisible. Néanmoins, le processus s'avérant toujours déceptif, la surenchère est permanente ; il vous faut sans cesse inover sur la forme, à n'importe quel prix. Quitte à investir du jour au lendemain un nouveau champ mystico-religieux pour paraître plus exalté, plus romantique - un petit tour de passe-passe pour séduire les plus jeunes. Hier la mode était au viril paganisme celtico-nordique ; authentique et généreux, tout droit sorti d'une pub Herta, le guerrier païen résistait fièrement face au juif capitaliste. Aujourd'hui c'est un gloubi-boulga néo-techno-catho qui s'impose face à la menace islamo-terroriste. Un revival d'un genre inédit, qui jadis aurait même fait hurler de rire Bloy ou Guénon.

Au final, ces gesticulations se soldent toujours par une vision fondamentalement simpliste de l'humanité ; un principe de réalité aussi pauvre que débile, où le "choc des civilisations" et la résistance contre le "Système" sont aussi faciles à décrypter qu'un album de David Guetta. Tout effort de connaissance est ici synonyme d'hérésie. Comme leurs homologues beaufs de gauche, et dans une approche strictement symétrique, un seul refrain suffit aux Consanguins pour bricoler leur discours metamerdique : la légendaire et si contradictoire lutte contre la "pensée unique" (ou "bien-pensance", si l'on est sensible au charme moisi du dialecte vieille France).

Consanguin : Ah, la pensée unique ! Alors là, vous pointez du doigt la clé de voûte de notre pensée : avouez que ça a de la gueule !


M. Enfoiros : Mmmm... Tout le monde tombe toujours d'accord pour dénoncer la pensée unique, c'est merveilleux. Comment vous expliquer cela autrement ? A ce stade de nullité rhétorique apparaît le point de ralliement ultime de la contestation consensuelle, territoire de non-argumentation par excellence, où les semblants d'idées se croisent dans l'insignifiance d'un pet de cafard. Tout devient possible, les portes ouvertes s'enfoncent à coup de bazooka et les débats les plus navrants fleurissent, s'enchaînant sur des sujets parfaitement surréalistes (au hasard : la gloire d'un Grand Occident imaginaire, la renaissance d'un christianisme primitif via la figure charismatique d'un panzer-kardinal, les risibles fantasmes prépubères d'un attaché de presse amateur de pin-up ratées, la nécessité d'inventer l'eau en poudre ou le dé à deux faces, etc.).

Finalement la pensée consanguine est assez peu "intellectuelle". Elle reste bloquée dans le champ des petites déviances comportementales, n'intéressant que les sociologues débutants et les psychiatres véreux. Elle surgit comme par automatisme, telle une connexion neuronale qui s'enclenche chaque matin au réveil, lorsque pointe l'envie subite de chier du cerveau, pathétique réflexe de soulagement après une nuit sans sexe - une de plus.

Consanguin : Mais tout de même, les choses sont simples : il y a le Bien, et il y a le Mal. Avouez que le monde est rempli de gens très vilains qui font rien qu'à menacer les gens biens ! Par exemple, euh, je sais pas, il y a les socialo-communistes, les droidelomistes, et puis les arabes, les musulmans, tout ça...


M. Enfoiros : Ah. Les Arabes et les Musulmans, oui, je vois. Un sujet que nos guérilléros en culotte courte affectionnent tout particulièrement, semble-t-il. S'ils n'ont certes jamais lu une seule ligne du Coran, ils se donnent au moins la peine d'en parler, me ferez vous remarquer. Mais le plus remarquable reste sans doute leur ignorance crasse et irrémissible des lignes de partage contemporaines de la "sphère" arabo-musulmane - et je n'évoque même pas ses plus intimes subtilités. Fort d'une encyclopédique sous-culture glanée dans une quelconque "station spatiale pour écrivains" ou sur d'héroïques forums hyper-méga-subversifs, le consanguin lambda s'imagine que "Motalefeh", "Mudawana" ou "Sahwa" sont des patisseries libanaises, et croit dur comme fer que Front Polisario a sorti son dernier album en 1987.

La misère intellectuelle de vos congénères ne connaît aucune limite. Seul l'art de la pose, pathétique stratégie de diversion, leur donne l'illusion d'avoir quelque chose à dire. A la manière de certains rappeurs travaillant leur image de "mafieux" en carton-pâte - et la similitude est étonnante - le consanguin de base aime se parer d'une aura de guerrier solitaire pour donner le change, usant et abusant d'un champ lexical cyber-militariste. Notons que son ignorance s'y étale tout aussi joyeusement, car au stade précambrien, il est tout aussi peu aisé de lire Sun Zi dans le texte que d'apprendre le fonctionnement et le maniement réel d'un HK MP5 ou d'une bombe à impulsion eléctromagnétique. Décidément même le vernis ne tient pas... Dénué de toute profondeur intellectuelle, le consanguin n'est pas même crédible en superficie.

Consanguin : Et bien !! Voilà qui remet le facteur à cheval, si vous me permettez l'expression ! Je l'ai toujours dit, il faut vraiment qu'on s'organise pour apprendre à tirer. Merci, merci mille fois cher Professeur, une fois de plus votre intervention fait mouche ! Amen.

Consanguin wants you !

Consanguin wants you !
*** Enrôlez-vous dans le Choc des Civilisations ***

And remember...