15 novembre 2008

Qu'est-ce qu'un français de souche ? (3)


Nous poursuivons cette semaine notre enquête au sein de la fantastique galaxie des fun-fascistes de la toile, toujours à la recherche de la souche du français. Nous nous sommes laborieusement extirpés de la super logochiasse du sautillant Ftlaker, et nous avons quitté les rivages boueux de sa Zaune pour rejoindre la côte, ses routes nationales, à la recherche d'un carrrefour consanguin plus fréquenté.


Qu'est-ce qu'un "français de souche" ? Mais il fallait bien sûr se rendre sur le portail des autoproclamés "français de souche", tenu par notre François Setouche préféré. Cette amusante gargouille borgniste continue de tenir salon, et c'est le gros Rencard des Raclons Racistes (RRR). Ici, les discours islamophobes répondent aux homélies antisémites, entrecoupés de sonores dégueulis haineux quand la cervoise tape un peu fort. Les natios, issus de ce que François n'hésite pas à appeler la "diaspora" gauloise (sic), se réunissent tous les jours pour deviser de concert, gros branleurs d'entreprise ou sacs à vins désoeuvrés à domicile, et parfois même un wisigoth du Vaucluse, un celte de Marseille ou un viking de Melun improvise un slam patriote au biniou. On entend un accordéon, une vache meugle, et l’étable souchienne online commente l’actualité, telle qu’elle lui est servie tout chaude par le taulier, comme un gros sanglier fumant dont le sang dégouline depuis la cuisine jusqu'aux gamelles des crétins du réfectoire. Une belle unanimité colore toujours le concerto des sous-chiens, une camaraderie qu’on sent virile et élevée au bon grain, et une sollicitude générale envers toute mouvance nationaliste en europe - malgré il est vrai quelques fausses notes entre partisans. ça rote, ça pète, ça chante des trucs paillards et ça fantasme sur une "révolution", non plus prolétarienne mais "ethnique".

Village Global = fissure anale

Le complot planétaire qui les accable ? Le Village Global. La nécessité d'être "citoyen du monde", la désaffection pour la nation et le mélangisme obligatoire (dont on cherche encore par quel traité international il est imposé). Mais très rapidement, on constate que ce refus d'être "citoyen du monde" traduit surtout une grosse haine bien dégueulasse du couple interracial du 5e, des reubeus d'en face, ou du nigérien qui livre les pizzas...

Logiquement fréquenté par des "natios", le portail à enseigne bovine confirme les points suivants : le français de souche parle très souvent d’Alain Soral, de Kemi Seba, de Harkis, de rap, de Ségolène Royal, de Besancenot, de Morsay, de sorte qu’on pourrait croire qu’il milite à SOS Racisme ou qu’il est gros fan de Zebda. Nenni ! Ces marronniers sont en réalité les poupées vaudoues qui représentent Tout Ce qui n’Est Pas Blanc et Catholique, et en réalité tout ce qui n’est pas raciste, frileux, vindicatif, et passablement illettré. C’est du moins ce qui ressort de notre fréquentation des commentaires. Et là, ô stupéfaction. Fascination. Cloaca Maxima.

Hu ? Humfrr !

A lire les pichets de bave liquoreuse quotidiennement versés via ce blog, il apparaît que ce mythe d’une racine homogène repose sur une idéologie du sol, du terrier, de l’humus, de la souche. La France est fille aînée de l'Eglise, les nuages radioactifs et les crises boursières s'arrêtent à ses portes, tous comme les sarrazins avaient jadis le bon goût de le faire à Poitiers. La croûte terrestre sous les pieds des petits souchiens, et la stratosphère au-dessus de leurs têtes blondes, sont toutes entières identifiées comme leur propriété de droit divin. Cette fiction constitue une sorte de niche en bois dans laquelle le souchien revendique le droit de poser ses fèces et de circonscrire son territoire. Mieux, il aime le Christ, et agonit d'injures son prochain. Une sorte de "sainte souveraineté cocardière" moins juridique que génétique, bref une conception biologico-médiévale de l'hexagone. Cette conception délirante est reprise par la quasi-intégralité des débiles profonds qui nourrissent le site de leurs commentaires.

Super-Souchien contre l'Axe Bruxelles-Téhéran

Comme tout bon consanguin largué qui souhaite réintégrer l’utérus maternel, le sous-chien veut rentrer dans sa niche, il veut la restauration d’une patrie éternelle dont le projet politique n'est pas de synthétiser un truc un peu collectif, mais de définir une identité, une essence, en labourant l’histoire nationale et en gueulant comme des truies devant toute crise économique ou sociale.


Les souchiens vivent généralement dans les murs et sous les éviers. Mais depuis leurs tanières, la main en visière, ils perçoivent nettement l'avenir hexagonal : une islamisation radicale et exhaustive depuis Naples jusqu'au Finnmark, de l'Atlantique à l'Oural, et dans les 5 ans. Yeah, rien que ça. Toute l'Europe. Toute ? SAUF le petit village des damnés qui résiste et prône l'avènement du Renouveau Souchien (de toutes façons c'est ça ou l'extinction biologique, donc). Ce rêve souchien, superbement statique et sclérosé, doit se concrétiser dans une prise de pouvoir quelconque, une providentielle xénophobie d’état, et l'institutionnalisation d'une ségrégation admirablement hargneuse. Le projet repose sur la réactivation d'un mythe racialo-national, sur lequel s’élaborerait in fine un corpus normatif légitimant l’humiliation de certaines parties du territoire et de la population, au nom d’une dignité retrouvée et d'une nouvelle vitalité. Une sorte de pan-souchisme, quoi. Chacun chez soi, back to the time. La notion d’identité étant un gros ballon de nitroglycérine sur un terrain de rugby, l’étape suivante donne généralement lieu à des excuses nationales 60 ou 100 ans plus tard.

Le discours du webmestre est simple : il ne fait pas de propagande, non madame, il choisit des thématiques. Il ne fait que juxtaposer des faits divers et articles de presse qui relèvent de l'immigration ou de "l'idéologie multiculturelle" (une parfaite objectivité dans la sélection, par conséquent). Le site se targue même de "pluralisme" : royalistes, européistes, antisémites, islamophobes, sionistes, une vraie partouze benetton, en somme. L'essence de la souche réside ici : c'est un autre "vivre-ensemble". Un communautarisme blanc, catholique, "bon teint", intrinsèquement raciste et demeuré : une tribu lo-cale. Dont les membres manient avec une ébouriffante obsession la pittoresque notion d'immigré de 3e ou de 4e génération (un barbarisme anachronique comme les meilleures propagandes savent en produire). Ensemble, François et les Souches émettent un long pet qui se veut pensée.

De quoi est faite cette pensée souchienne ? Hormis les tartes-à-la-crème conceptuelles de patrie, honneur, fraternité, tradition, autant de principes débités en mode litanique sans jamais d’exploration réelle, les sous-chiens s’expriment en aboyant. Le webmaster sort une actu (un coup de filet des stups en Seine & Marne, la construction d’une mosquée aux Pays-Bas) et le petit auditoire aboie. Ça hurle, ça piaule, ça grogne, ça jappe. Le webmaster propose ensuite un fait divers, (un crétin tombe d’un toit, la délinquance urbaine foisonne), et le chenil repart au quart de tour. Ça crache, ça feule, ça glapit et ça grouine. Et ainsi de suite, un petit théâtre pour sursinges dressés - ah, c’est vrai, les métaphores animales sont dangereuses, mais on note justement qu’elles constituent l’unique proposition esthétique du site des petits frontistes à la croix de fer... On se soucie assez peu de la langue finalement, et c'est souvent en mode SMS qu'on dégueule son racisme quotidien. Le style SMS est bien pratique : il permet de masquer les colossales lacunes grammaticales ou syntaxiques qui accablent la majorité de ces zozos apologistes de la "francité". Une vraie cacophonie de gallinacées illétrés : les souchiens caquettent, et c'est bien tout ce dont ils sont capables.

La rhétorique souchienne est commune à tous types de fondamentalismes, et on note sur ce plan des exhortations guerrières et des professions de foi que ne renieraient pas les plus moisis des talibans. En revanche, le dialecte souchien mélange l'esthétique surannée du chasseur pété à l'armagnac et la rudesse du spetsnaz marbré à la vodka. La poésie tribale des souchiens a quelque chose d'unique... Comme un long rot mouillé, dont l'accent du terroir varie selon les régions.

On note au passage que le dispositif discursif des souchiens est totalement autoalimenté. Un vase clos parfait, le bouillon de culture idéal pour que se développent les germes du grégarisme le plus criminel. Un post déclenche une vingtaine de réactions, qui en engendre autant - bien que tous les museaux soit tournés dans la même direction. Un terrible grégarisme sectaire, oui, comme seul un groupuscule extrêmiste en a le secret. La médecine moderne socialiste et matérialiste pourrait y voir une sorte « d’émétophilie collective babines retroussées », qu’elle a déjà diagnostiquée parmi combien de cellules syndicalistes ou religieuses.

La timbale, pour les sous-chiens, consiste à s’appuyer sur des agressions en banlieue et sur l’imagerie anti-occidentale affectionnée par les agresseurs, pour s’affirmer victime du "dogme de l'antiracisme" et parler d'islamisation. Quitte à mentir comme des garçonnets de 5 ans et se faire passer pour banlieusards quand on habite Reims ou l’Auvergne. Chez François Setouche, on dispense des conseils d’infiltration virale, on essaie d'éviter les poursuites judiciaires, on censure à tout va dès qu'un message apporte une fausse note dans le concerto raciste, et on contacte même les petits geeks qui torturent ce crétin de Morsay, pour voir si y a pas moyen de moyenner. Ce qui place la barre à hauteur de taupinière, mais alors, qu’est-ce qu'ils en sont fiers.

Le Glaive et la Burne

De fait, les hybridations sémiotiques comme « islamogauchiste » ou « ethnomasochiste » ont filtré dans le champ lexical du souchien, pour lui permettre d’articuler un peu plus son long borborygme guttural dit du « mâle blanc en voie d’extinction ». Un râle fort et fier, vitaliste, que dis-je, survivaliste, en ces temps harmaguédonesques. Pas un râle de fiotte - d'ailleurs le souchien est passablement homophobe.

Le Souchien Eternel

On ne peut qu’être choqué, à ce titre, de la misère sexuelle qui règne en ces lieux. La femme, qui devrait fermer un peu plus souvent sa gueule et se translater prestement vers la cuisine, est un fragile butin qui se laisse facilement hypnotiser par le libertarisme gauchiste ou l’exotisme africain. Comme la teub d’un sous-chien est un peu son axis mundi, il faut qu’il montre qu’elle est énorme, avec la classe d’un VRP de film porno. La femme, du coup, peut parfois ignorer royalement le souchien pendant toute sa vie.

Pas toutes, cependant. Le parti borgniste ne s’y est pas trompé, qui s’est rué prendre langue avec cette fine fleur du réacosme autour de quelques boutanches de picrate, comme il se doit. Il est ainsi possible pour la direction Borgne d’y prendre la température des troupes, comme une grosse Arlette Laguillier blonde au milieu de militants aussi enragés qu’ahuris. Mais on sait depuis longtemps que le parti Borgniste recrute ses troupes dans les caniveaux. Les souchiens n'y font pas exception. D'ailleurs ils n'aiment pas tellement les exceptions. Ils aiment l'homogénéité, la monochromie. Le sang pur et la hiérarchie. C'est très simple : poussez la "logique" souchienne à son terme, vous obtenez charters, progroms et génocides. Les souchiens du site François Setouche les appellent d'ailleurs ouvertement de leurs voeux. Comment ça illicite ?

Le schisme arabo-judéophobe

Par ailleurs, tout souchien se voit un jour poser la question, comme une sorte de rite symbolisant le passage à l'âge adulte : es-tu plutôt arabophobe ou judéophobe ? Certains, grands princes, osent même une synthèse volontariste et profondément altruiste : « occupons-nous d’abord des reubeus, ensuite on verra pour les feujs ». Tout un programme... Chacun des deux camps a son ethnie, sa religion détesté, ses faits d'armes, ses références historiques, et même ses écrivains (lesquels s'affrontent d'ailleurs parfois, en champions de leur xénophobie propre, sur internet ou par billets doux interposés, sous les encouragements de leurs groupies respectives). Cette dialectique judéophobie / islamophobie est assez récurrente, et constitue la principale pierre d’achoppement au sein d’un cloaque qui clame par ailleurs sa viscérale homogénéité. Des viscères ? Oui en effet : abats faisandés, intestins malades et foies explosés. Coeurs secs. Poumons atrophiés. Testicules nécrosés. Une vraie dissection, celle-là (pas une branlette littéraire de frontiste désoeuvré).

Enfin, les grappes souchiennes n'ont de cesse de s'enthousiasmer pour l'Infranationale Extrêmiste, et le taulier François fait défiler l'actualité de nos confrères européens : Vlaams Belang ou Ligue du Nord, Geerts Wilder, Slobodan Milosevic, Vladimir Jirinovski ou Roman Giertych, etc (1), un zapping en boucle sur les figures nationalistes et racistes du continent.

Alors, au final, qu'est-ce qu'un français de souche ?

Il semble bien que ce soit une pure fiction. Un agrégat de merde raciste et d'histoire mal apprise, un discours de cancrelat xénophobe, un sectarisme de flippette qui prend des poses de combattant bien planqué derrière son écran. Le site fdesouche donne une belle illustration de ce qu’est la Consanguinie sur la toile : une sorte de Klan virtuel sans les capuches pointues. Un petit théâtre pour meutes faméliques, dans lequel un webmestre variolé agite tous les jours plusieurs marronniers pour déclencher des séries d’aboiements, comme un gros con de voisin qui n'a rien à foutre de sa vie qu'emmerder ses contemporains.

Le "portail gaulois" est un radio-crochet des flippés, un supermarché online de préjugés, un fosse aux cons dont on s'étonne qu'elle n'ait pas encore fait l'objet d'une ordonnance du juge - mais peut-être que les souchiens ne sont lus QUE par des souchiens, ce qui explique qu'ils continuent à ne constituer qu'un épiphénomène qui fait rigoler en soirée.

En tous cas, le souchien est bien vautré dans son époque, à lui chier dessus tout le temps. C'est quoi un "français de souche" ? Ben la souche, tu vois, c'est un truc charnel, un truc que tu as en toi et qui te colle tes rares montées de testostérone. Donc en résumé, "si t'es pas dans la compréhension du concept de "français de souche", que Dieu t'y mettes, et si t'y es, que Dieu t'y garde, amen".


(1) Jörg Haider, Pym Fortuyn et Bruno Mégret ont été écartés des références souchiennes les plus courantes pour cause de sexualité déviante.

Consanguin wants you !

Consanguin wants you !
*** Enrôlez-vous dans le Choc des Civilisations ***

And remember...